Le cas choquant des start-ups aveugles

Photo de Oscar Keys sur Unsplash
Le marché est le seul et unique véritable bailleur de fonds de votre start-up : tout le reste, si vous êtes en mesure de satisfaire le bailleur de fonds, en découle !
Cette semaine, permettez-moi d’interrompre temporairement la série sur l’intelligence artificielle dans le marketing : je la reprendrai dès que possible, mais je ne peux pas reporter plus longtemps quelques considérations choquantes sur le thème du titre.
Ces derniers jours, j’ai eu l’occasion d’assister à la présentation d’une vingtaine de projets par autant d’aspirants strartuppers qui entament une nouvelle édition du cours « Devenir entrepreneur » promu par une importante association industrielle.
Bien que ce soit la cinquième année que je participe à cette initiative en tant que conférencier, c’est la première fois que je fais le point sur un aspect que je trouve assez choquant.
Je pense que j’ai pris autant de temps pour deux raisons principales :
- D’une part, je sors tout juste de l’expérience de gestion du projet qui a produit le document « Bonnes pratiques sur l’orientation des organisations vers le marché » (Prassi di Riferimento sull’Orientamento al Mercato delle Organizzazioni), édité par UNI Ente Italiano di Normazione (l’organisme italien de normalisation) et promu par moi-même et AISM Associazione Italiana Sviluppo Marketing (l’Association Italienne pour le Développement du Marketing) : il est peut-être explicable qu’après m’être concentré sur l’orientation au marché pendant plus d’un an, j’ai tendance à évangéliser sur le sujet à quiconque se trouve à ma portée, et que le sujet est devenu un peu une obsession pour moi, surtout ces derniers temps ;
- D’autre part, le programme du cours a été progressivement modifié : alors que dans la première édition à laquelle j’ai participé, il commençait par mon exposé sur l’importance du marché et le rôle fondamental du marketing mindset, ce sujet a été progressivement déplacé plus tard et, dans cette édition, il est programmé après ceux sur le « pitch » (la présentation concise de l’idée d’entreprise aux financeurs potentiels), les ressources humaines, le coaching et le plan d’entreprise.
Il est vrai que le cours se terminera toujours par le point culminant de la simulation d’entreprise avec laquelle j’essaie de faire ressentir aux participants le frisson de toucher du doigt la relation entre les décisions concurrentielles et les résultats économiques et commerciaux, mais il serait peut-être utile que le message sur l’importance fondamentale du marché soit martelé dans la tête des futurs startuppers dès le début.
Pour faire court et aller droit au but : devinez combien des vingt personnes qui ont présenté leur projet à l’ouverture du cours ont clairement indiqué à qui s’adressaient leurs produits ou services et quelles avantages ou solutions aux problèmes ces produits ou services promettaient d’offrir.
Combien d’entre eux, à votre avis, ont même fait allusion aux caractéristiques du public cible, à la valeur offerte, aux hypothèses de valeur/prix et aux comparaisons avec la concurrence ?
Disons qu’il y en avait deux pour être abondant ?
90% des stagiaires ont présenté leurs idées en se concentrant exclusivement sur eux-mêmes et en se fichant éperdument des problèmes, des besoins et des attentes du marché et de la manière dont ces attentes sont actuellement satisfaites ou non.
Je suppose qu’il s’est passé exactement la même chose dans les éditions précédentes du cours auquel j’ai participé, mais cette fois-ci, cela m’a particulièrement frappé, probablement parce que les autres fois, j’avais implicitement supposé que cela était normal et que j’aurais eu bientôt l’occasion d’essayer de faire changer d’avis les stagiaires.
Mais comment cela peut-il être normal ?
- Comment ne pas se rendre compte que le seul véritable financeur des entreprises est le marché ? Même si la start-up obtient un financement initial grâce aux talents de persuasion de l’entrepreneur lors du fameux pitch, si elle ne répond pas aux besoins spécifiques du marché et si elle ne le fait pas mieux qu’au moins quelques concurrents directs ou indirects, elle ne tient pas la route à long terme.
- Quel effet une magnifique campagne de communication peut-elle avoir à moyen et long terme si les avantages promis ne sont pas réels et concrets ? Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas possible de faire passer des avantages fictifs pour réels et concrets, mais combien d’argent cela nécessite-t-il et quelle serait l’éthique d’une telle démarche ?
- À quoi servent des managers et des structures organisationnelles supérieures si l’offre n’est pas en mesure de produire de la valeur pour l’entreprise en générant de la valeur pour le marché, c’est-à-dire en offrant un rapport valeur/prix qui soit à la fois compétitif et rentable ?
- Quel est l’intérêt d’un business plan s’il n’estime pas explicitement les potentiels du marché et n’argumente pas de manière crédible comment et pourquoi on compte en acquérir une partie, précisément grâce à un rapport valeur/prix gagnant ?
Je vous laisse les réponses évidentes à ces questions et, cette fois, au lieu de vous offrir un cadeau musical en guise de cotillon, je vous suggère de vous abonner à Enchanted Classics sur YouTube. Outre les playlists de musique classique, je trouve spectaculaires les tableaux de belles et douces filles qui les accompagnent : il est difficile de croire qu’ils sont générés par l’intelligence artificielle !
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